A la découverte de 6 poètes africains
La poésie est une suite de phrase enchantée dans la mélodie des mots et des phrases révélatrices.
D'une part, de part l'interpretation de la beauté des couleurs de nos émotions et d'autres parts, dans la définition de l'interprétation stylistique propre à chacun.
De l'art... dans l'art et la manière de faire les choses.
En ce sens, partons à la découverte de 6 poètes africains et d'une de leurs poésies phares, dans une quête d'enrichissement de notre panel littéraire.
Enjoy!
Sm Créations
1. Titre de la poésie : NEW YORK
Par Leopold Sédar Senghor
(pour un orchestre de jazz : solo de trompette)
" - I - New York ! D’abord j’ai été confondu par ta beauté, ces grandes filles d’or aux jambes longues.
Si timide d’abord devant tes yeux de métal bleu, ton sourire de givre
Si timide.
Et l’angoisse au fond des rues à gratte-ciel
Levant des yeux de chouette parmi l’éclipse du soleil.
Sulfureuse ta lumière et les fûts livides, dont les têtes foudroient le ciel
Les gratte-ciel qui défient les cyclones sur leurs muscles d’acier et leur peau patinée de pierres.
Mais quinze jours sur les trottoirs chauves de Manhattan
-
C’est au bout de la troisième semaine que vous saisit la fièvre en un bond de jaguar
Quinze jours sans un puits ni pâturage, tous les oiseaux de l’air
Tombant soudain et morts sous les hautes cendres des terrasses.
Pas un rire d’enfant en fleur, sa main dans ma main fraîche
Pas un sein maternel, des jambes de nylon.
Des jambes et des seins sans sueur ni odeur.
Pas un mot tendre en l’absence de lèvres, rien que des cœurs artificiels payés en monnaie forte
Et pas un livre où lire la sagesse.
La palette du peintre fleurit des cristaux de corail.
Nuits d’insomnie ô nuits de Manhattan ! si agitées de feux follets, tandis que les klaxons hurlent des heures vides
Et que les eaux obscures charrient des amours hygiéniques, tels des fleuves en crue des cadavres d’enfants.
- II -
Voici le temps des signes et des comptes
New York !
or voici le temps de la manne et de l’hysope.
Il n’est que d’écouter les trombones de Dieu, ton cœur battre au rythme du sang ton sang.
J’ai vu dans Harlem bourdonnant de bruits de couleurs solennelles et d’odeurs flamboyantes
-
C’est l’heure du thé chez le livreur-en-produits-pharmaceutiques
J’ai vu se préparer la fête de la Nuit à la fuite du jour.
C’est l’heure pure où dans les rues, Dieu fait germer la vie d’avant mémoire
Tous les éléments amphibies rayonnants comme des soleils.
Harlem Harlem !
voici ce que j’ai vu Harlem Harlem !
Une brise verte de blés sourdre des pavés labourés par les
pieds nus de danseurs
Dans
Croupes de soie et seins de fers de lance, ballets de nénuphars et de masques fabuleux
Aux pieds des chevaux de police, les mangues de l’amour rouler des maisons basses.
Et j’ai vu le long des trottoirs, des ruisseaux de rhum blanc des ruisseaux de lait noir dans le brouillard bleu des cigares.
J’ai vu le ciel neiger au soir des fleurs de coton et des ailes de séraphins et des panaches de sorciers.
Écoute New York !
ô écoute ta voix mâle de cuivre ta voix vibrante de hautbois, l’angoisse bouchée de tes larmes tomber en gros caillots de sang
Écoute au loin battre ton cœur nocturne, rythme et sang du tam-tam, tam-tam sang et tam-tam.
- III -
New York! je dis New York, laisse affluer le sang noir dans ton sang
Qu’il dérouille tes articulations d’acier, comme une huile de vie
Qu’il donne à tes ponts la courbe des croupes et la souplesse des lianes.
Voici revenir les temps très anciens, l’unité retrouvée la réconciliation du Lion du Taureau et de l’Arbre
L’idée liée à l’acte l’oreille au cœur le signe au sens.
Voilà tes fleuves bruissants de caïmans musqués et de lamantins aux yeux de mirages.
Et nul besoin d’inventer les Sirènes.
Mais il suffit d’ouvrir les yeux à l’arc-en-ciel d’Avril
Et les oreilles, surtout les oreilles à Dieu qui d’un rire de saxophone créa le ciel et la terre en six jours.
Et le septième jour, il dormit du grand sommeil nègre."
2. Titre de la poésie : SAGESSE
Par Birago Diop
"Sans souvenirs, sans désirs et sans haine
Je retournerai au pays,
Dans les grandes nuits, dans leur chaude haleine
Enterrer tous mes tourments vieillis.
Sans souvenirs, sans désirs et sans haine.
Je rassemblerai les lambeaux qui restent
De ce que j’appelais jadis mon cœur
Mon cœur qu’a meurtri chacun de vos gestes ;
Et si tout n’est pas mort de sa douleur
J’en rassemblerai les lambeaux qui restent.
Dans le murmure infini de l’aurore
Au gré de ses quatre Vents, alentour
Je jetterai tout ce qui me dévore,
Puis, sans rêves, je dormirai – toujours –
Dans le murmure infini de l’aurore."
3. Titre poésie : LE CANTIQUE DES CANTIQUES
Par Jacques Rabemananjara
" I
Nos destins vont franchir les termes des promesses.
Ils s’en iront, parmi les rondes des amours,
Annoncer le lever de nos astres qui naissent,
Fêter l’aurore unique et chanter tour à tour
et ta grâce et ta tresse.
Ma Bien-aimée, à toi ma vie, à toi mon coeur !
Par quel signe, quel mot te traduire ma flamme.
Pas un seul verbe humain, pas même tous mes pleurs
Ne sauraient exprimer les élans de mon âme
et toutes ses langueurs.
II
Nous voici parvenus au tournant de la voie.
Et, la main dans la main, vers un monde nouveau,
Nous allons parsemer la route de nos joies
Et dénouer du Sort l’énigme et l’écheveau
fait d’ardeur et de soie.
Sur la pente du ciel où l’Amour nous sourit,
L’Avenir, fraternel, escorte l’Espérance.
D’un geste tu m’auras de mes peines guéri ;
Et nous glorifierons, tous deux, d’un même cri,
l’heureuse délivrance.
Quel charme à notre ivresse ajoutera l’azur ?
La nuit multipliera l’éclat de ses étoiles.
Mais j’attends le signal où l’instant le plus pur
M’attachera captif à l’ombre de ton voile :
Tout est prêt ! Tout est mûr !
III
O Bien-Aimée, à nous la coupe des délices !
Nos voeux ont prospéré.
Nos désirs sont comblés.
Pour consacrer l’aveu le temps se fait complice
Et je sens tout le ciel à mes genoux trembler
d’émois sans artifice…
L’étreinte de tes bras formera l’horizon.
Tout l’Univers, ce soir, d’un bout à l’autre pôle,
Viendra nous accueillir au seuil de la maison.
Le poids de mon bonheur chargera ton épaule
de jours en floraison."
4. Tiré du livre "Légendes et poèmes"
Afrique debout : « Tu es le maître »
(…)
Par Bernard B. Dadié
"Tu es le maître.
C’est toi qui plantes le riz,
C’est toi qui travailles la laine,
C’est toi qui bâtis les châteaux
Et c’est toi qui crèves de faim
Et c’est toi qui vas en guenilles,
Et c’est toi qui couches à la belle étoile.
Je n’ai point d’accès dans leur classe,
Je n’ai point de droit de cité dans leurs livres.
Je suis d’un autre monde, le monde du peuple.
C’est pourquoi sur la cora de la vieille Afrique
Aujourd’hui en mouvance,
Par les villes et les prisons,
Sous les baobabs des carrefours,
A chacun
Je clame :
Tu es le roi des usines,
Tu es le roi des champs,
Tu es le peuple,
Tu es le maître ! "
Bernard B. Dadié
5. Titre du poème :
Oiseau
Par Aimé Césaire
"L'exil s'en va ainsi dans la mangeoire des astres
Portant des malhabiles grains aux oiseaux nés du temps
Qui jamais ne s'endorment jamais
Aux espaces fertiles des enfances remuées."
"Ferrements"
6. Titre du poème : "Les racines congolaises"
Par Jean Baptiste Tati Loutard
"Baobab ! je suis venu replanter mon être près de toi
Et mêler mes racines à tes racines d’ancêtre ;
Je me donne en rêve à tes bras noueux
Et je me sens raffermi quand ton sang fort
Passe dans mon sang
Baobab !
« l’homme vaut ce que valent les armes ».
C’est l’écriteau qui se balance à toute porte de ce monde.
Où vais-je puiser tant de forces pour tant de luttes
Si à ton pied je ne m’arc-boute ?
Baobab ! quand je serai tout triste
Ayant perdu l’air de toute chanson,
Agite pour moi les gosiers de tes oiseaux
Afin qu’à vivre ils m’exhortent.
Et quand faiblira le sol sous mes pas
Laisse-moi remuer la terre à ton pied :
Que doucement sur moi elle se retourne !"
Des poèmes riches d'émotions et de sens prenant... Nous vous invitons à continuer sur le chemin de la découverte de ces oeuvres majeurs poétiques africaines... Comblant nos journées par des touches d'éclat colorées et apaisant nos reflexions par tempérance et transparence imagé.
Intemporels... comme ces poèmes nous animent.
XOXO - SM Créations
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